24 janvier 2022

Métier - Collège - Lycée - Violences scolaires - LV - ...

Une attention particulière pour la voie technologique

Le bilan de la réforme de la voie technologique réalisé par l’IGEN en 2016 pointait déjà plusieurs écueils :

  • Une déprofessionnalisation amenant un saupoudrage technologique ne permettant pas de parfaitement préparer les élèves à la poursuite d’étude, et leur demandant une conceptualisation donnant l’impression d’un manque de concret contraire à leurs attentes, et souvent incompatible avec leur faible profil de recrutement… Phénomène aussi largement pointé par les collègues des matières littéraires (français, philo).
  • La poursuite d’études en BTS diminue, du fait notamment des quotas réservés aux bac pro, tandis que de nombreux BUT ou écoles paramédicales n’adaptent pas leurs attentes aux profils des élèves et aux programmes technos… amenant une poursuite croissante par défaut vers la licence, trop souvent voie de l’échec… ou bien des réponses aux vœux BTS seulement en septembre, les recrutements étant auparavant bloqués par l’attente de remplir le quota de 50% de bac pro.
  • Une orientation qui demeure genrée par filière.
  • Des regroupements de spécialités réclamant un très large champ de compétences mettant en danger de nombreux collègues, particulièrement en STI2D.

Ce que reconnaît surtout ce rapport c’est que la déprofessionnalisation et la déspécialisation relative des enseignements de la voie technologique, en augmentant la part des enseignements communs aux différentes spécialités, permettent “ une utilisation plus rationnelle des moyens (humains et matériels), au détriment de l’efficacité pédagogique ; les chefs d’établissement rationalisent leurs moyens en regroupant dans une même classe des élèves de spécialités différentes pour tout ou partie des enseignements communs”. Le coût horaire de la voie technologique s’est ainsi rapproché de celui de la voie générale, surtout dans la filière tertiaire.
Bref une réforme qui visait déjà l’économie et la souplesse de gestion !

Depuis, et notamment avec la pleine, mais mouvante, entrée en vigueur de la réforme des lycées, la situation s’est encore détériorée avec des problématiques variables suivant les filières :

  • STMG : Malgré la fin de l’option obligatoire de seconde, et la baisse de 75% des élèves suivant l’option Management et gestion, l’effectif STMG continue d’augmenter en représentant plus de 50% de la voie techno. Ceci montre l’augmentation d’une orientation par défaut, accueillant de plus en plus de refusés de la voie générale ou professionnelle… donc des profils plus hétérogènes, souvent plus faibles. Malgré cela, l’enveloppe pour les groupes à effectif réduit demeure la plus faible (7h). Leur poursuite d’études se complique aussi du fait d’une ouverture insuffisante des BUT à ces profils d’élèves, tandis que les BTS leur limitent l’accès, du fait du quota de bac pro…. ce qui fait le bonheur d’écoles privées en tout genre : un investissement toujours payant pour les parents, rarement de CSP favorisées…. mais pas toujours pour les étudiants !
  • STI2D : Avec une voie générale qui ne sélectionne plus spécifiquement sur les matières scientifiques (contrairement à l’ex filière S), le recrutement en voie techno est en forte baisse quantitative et qualitative. Ainsi, le remplissage actuel forcé des classes centré sur un minimum de spécificités, met en danger les 4 offres restantes sur le territoire, ainsi que les capacités à la poursuite d’étude. Il existe de plus un déficit de formation pour permettre aux collègues d’assumer la polyvalence extrême de ces 4 spécificités fourre-tout.
  • En voie générale, la spécialité Sciences de l’Ingénieur (SI) est mise en danger par l’exigence des formations d’ingénieurs dans Parcoursup de conserver les spés maths et physique en terminale, d’autant plus lorsque l’option math complémentaire n’est pas proposée dans un établissement.
  • ST2S : Malgré une attractivité toujours forte (taux d’1.5 en Gironde qui devrait être absorbé par la seule ouverture de classe techno prévue à la rentrée 2022), elle pâtit d’avoir supprimé la préparation aux concours paramédicaux, manquant pour cela de moyens horaires, et du faible nombre de BTS/BUT dans cette spécialité. Nombre d’élèves se dirige là aussi vers des préparations privées (l’IGEN notait déjà en 2016 : “L’alternative que constitue la préparation aux concours dans les instituts privés est coûteuse et ne peut donc pas être considérée comme satisfaisante pour le service public de l’éducation nationale.”) ou vers des licences d’attente… seuls 2/3 ont une proposition avec Parcoursup.
  • STL : Handicapée par un effectif, donc une réputation, réduite, la déspécialisation avec la création d’enseignements transversaux devait amener une ouverture des poursuites d’étude, notamment vers des études longues. Or l’orientation vers les CPGE stagne mais celle vers les licences augmente fortement…. avec quel taux de réussite en L3 ? (Le taux de passage en L2, toutes séries techno confondues, de 14% !)
  • STD2A : L’option Création et culture design de seconde, étant toujours exigée pour l’entrée en 1re STD2A, n’a connu qu’une baisse de 10% en 2019. Regroupant majoritairement des filles de CSP+, la mixité n’a toujours pas été atteinte. Elle connaît un fort taux d’attractivité sur l’académie (2.5 en Gironde avec seulement Magendie) mais malgré cela aucune ouverture ne semble prévue…. du fait d’un coût horaire important (18h de groupe à effectif réduit) ?
  • STHR : conserve aussi l’option dès la seconde. Les bacheliers qui envisagent de poursuivre dans la spécialité se focalisent sur le BTS hôtellerie et restauration et le BTS responsable d’hébergement ; et entrent « en concurrence », non seulement avec les bacheliers professionnels qui souhaitent poursuivre après leur baccalauréat, mais surtout avec les bacheliers généraux après une année de mise à niveau dans les classes qui leur sont réservées.

Nous le voyons, les défis pour la voie technologique sont nombreux.

Le SNES-FSU propose une option technologique obligatoire en seconde avec une dotation spécifique fléchée de 3 ou 4h, pouvant allier plusieurs champs dans le cadre de projets.
Le SNES réfléchit aussi à un passage à un BAC techno en 4 ans, seconde incluse, afin de retrouver un nécessaire temps long d’apprentissage, pour mieux développer la pédagogie par projet, ADN de la voie.

Afin de rester particulièrement vigilant, je vous incite à ne pas hésiter à me faire part de vos réactions à cet article, à me remonter les problématiques que vous rencontrez dans votre établissement.
Je reviendrai vers vous bientôt, par le biais d’une liste de diffusion mail, pour une enquête plus détaillée sur les effectifs et problématiques de la voie technologique dans notre académie.

Stéphane Wittorski, S3 voie technologique, voie.technologique@bordeaux.snes.edu