Nous aurions pu penser qu’en ces temps de crise inédite, notre ministre allait enfin abandonner les annonces fracassantes et la com’ pour adopter une posture responsable et bienveillante à l’égard des enseignants mais aussi des élèves et de leurs familles. Las ! Il n’en a rien été puisque son refus d’anticiper la fermeture, pourtant prévisible, des établissements scolaires puis ses déclarations sur la « continuité pédagogique » qui allait se mettre en place et permettre « de continuer d’élever le niveau de tous » ont été à l’origine de grands cafouillages et de pressions mises sur les enseignants.
Et nous ne parlons même pas ici du fait que le mépris des conditions de sécurité est toujours à l’œuvre entre l’accueil des enfants de soignants non sécurisé et les demandes d’aller dans les établissements pour y donner des documents pour les familles sans moyens informatiques auxquelles il faut absolument résister.
Nous avons tous conscience désormais, après presque trois semaines de fonctionnement à distance que la « continuité pédagogique » n’est qu’une gestion de la discontinuité, qu’une veille pédagogique.
Elle ne peut remplacer la classe en présentiel avec ses interactions, entre élèves, entre élèves et prof, les explications répétées inlassablement, les corrections immédiates.
Sur un plan technique d’abord où les outils légaux à notre disposition (ENT, Pronote, Cned) ne fonctionnent pas toujours… et sont loin d’être tous accessibles aux élèves, qui pour certains n’ont qu’un téléphone portable, ou un ordinateur partagé, pour travailler.
Sur le fond, car on ne peut croire que la lecture de cours, puis des corrigés, les exercices faits sans aucune aide (pour une partie plus ou moins importante de nos élèves) suffisent pour que les élèves assimilent de nouvelles connaissances et compétences.
Nul doute que tout ce qui aura été vu pendant cette période devra être revu en classe, nul doute aussi que cette situation va creuser les écarts scolaires.
Par contre, la quantité de travail que cette situation exige de nous est évidente aussi : tout est chronophage : mettre en forme les cours, taper les corrigés, répondre aux mêmes questions plusieurs fois etc.
Alors, préservons-nous et faisons notre travail, en professionnels, qui n’ont pas besoin d’injonctions, qui sommes conscients que la situation n’est pas normale et que tous nos efforts n’y changeront rien !
Utilisons notre liberté pédagogique pour décider comment nous travaillons avec nos classes, si nous les évaluons (sans exagérations !) ou pas… car qui peut mieux que nous savoir de quoi ont besoin nos élèves. Et ce n’est pas identique d’une classe à l’autre.
Rappelons-nous que pour tous ceux et celles d’entre nous qui ont des enfants jeunes, ils et elles peuvent avoir une ASA (autorisation spéciale d’absence) et ne pas faire de télétravail… et ils et elles peuvent le rappeler à des directions zélées qui demanderaient des comptes !
Guilaine DE SAN MATEO