L’Ecole du Rhaine : l’école de la sélection, de la ségrégation et de la soumission.
Le projet du RN se décline en deux temporalités avec « jusqu’à l’automne : le temps de l’urgence » puis « le temps des réformes ».
Il est frappant de constater que l’Ecole ne fait pas partie du premier temps, dédié à la qualité de vie (pouvoir d’achat et santé) à la sécurité et à l’immigration.
Ce n’est donc pas une priorité pour le RN.
D’ici à l’automne, il devrait y avoir « plusieurs consultations avec les corps intermédiaires » donc normalement avec les syndicats.
Le projet global du RN est la « remise en ordre » du pays et de ses écoles. Bardella invoque pour ce faire un « big bang de l’autorité ». Dans « le temps de l’urgence », on trouve quelques propositions liées à l’Ecole avec notamment, page 6, le volet « sécurité » qui prévoit le soutien aux fonctionnaires attaqués par le renforcement de la protection fonctionnelle.
Actuellement, il nous appartient de formaliser notre demande de protection fonctionnelle par écrit sur le site Colibri.
Notre demande doit être motivée et comporter toutes les précisions utiles sur les faits ou les poursuites pour lesquels nous sollicitons la protection fonctionnelle, notamment les documents établissant le lien entre les attaques et nos fonctions.
Page 12, les visites médicales scolaires redeviendraient systématiques.
Page 14, l’abrogation de la réforme des retraites serait en partie faite pour « inciter les jeunes à entrer de manière précoce sur le marché du travail ».
L’Ecole n’est traitée spécifiquement qu’à la page 18 dans le thème « L’impératif de transmission » et à la seconde place.
Il s’agit de « Restaurer l’excellence de l’école française et de la formation ».
Le RN reproche aux gouvernements précédents d’avoir « déconstruit » (?) l’école en y voyant l’effondrement du niveau scolaire qui « pénalise les acteurs économiques ».
L’enjeu de l’Ecole n’est donc pas la formation de citoyennes et de citoyens libres et éclairé.es mais celle d’une main d’œuvre corvéable.
Les enseignants sont flattés pour leur dévouement puis plaints en tant que victimes de la « bureaucratie envahissante » et d’agressions. Leur mission est alors résumée et cantonnée à la transmission de valeurs et de connaissances.
Pour ces législatives, le programme scolaire du RN est famélique… comme la plupart de ses autres pans. Il n’est qu’une reprise très partielle du projet présidentiel de Marine Le Pen dénommé « M L’Ecole » https://rassemblementnational.fr/documents/projet/projet-l-ecole.pdf
Ce programme entend d’abord recentrer les enseignements sur les savoirs fondamentaux définis comme les sciences (en fait les mathématiques), le français et l’histoire (celle du roman national assurément).
On retrouve ici le très réducteur mantra blanquérien repris ensuite par Attal.
Le RN prétend revaloriser le métier d’enseignant du recrutement à la fin de carrière mais sans expliquer comment.
Dans son programme, page 10, Marine Le Pen évoquait pourtant la revalorisation des salaires de 15 % en cinq ans.
Il veut aussi combattre la bureaucratie pour redonner libertés et moyens aux professeurs.
Là encore ces termes très larges ne sont pas explicités.
De nombreuses déclarations de membres du RN (mais aussi de la droite républicaine et marconiste) dénoncent à l’envi des idéologies qui gangréneraient l’Ecole comme la « théorie du genre », l’islamo-gauchisme ou le wokisme. Certains réfutent même la notion de débat en classe. L’Ecole ne serait donc pas un lieu de réflexion, d’échanges et d’argumentation mais un simple élevage de perroquets ânonnants ?
Derrière ces diatribes et ces promesses fallacieuses du RN, il y a bien un carcan réactionnaire et nationaliste qui conditionnerait et limiterait totalement notre liberté pédagogique.
La proposition suivante vise à soutenir financièrement les jeunes et les entreprises faisant le choix de l’apprentissage et de l’alternance. Cette mesure existe déjà car l’Etat donne actuellement 6 000 euros d’aide maximum par apprenti. Le programme n’évoque pas le « collège modulaire » (merci le SNALC !) qui s’inscrit dans le « choc des savoirs » pour devenir l’école du tri social précoce. Avec la disparition du collège unique créé en 1977, il s’agira d’orienter les élèves dès la Quatrième pour servir de main-d’œuvre presque gratuite pour les patrons.
La dernière proposition le confirme en voulant adapter l’offre de formation initiale et continue aux besoins réels des branches professionnelles. Il y aura donc une assignation géographique et sociale des élèves les plus fragiles. D’autres annonces sont faites sur les plateaux de télévision et dans les journaux notamment sur l’uniforme obligatoire en primaire et au collège, sur l’interdiction des téléphones portables jusqu’au lycée, sur les conseils de discipline en primaire, sur des sanctions disciplinaires planchers, sur le retour de la loi Ciotti de 2010 qui suspendait les allocations familiales et les bourses scolaires en cas d’absentéisme ou de perturbations graves et répétées…
Roger Chudeau, ancien inspecteur général de l’Education nationale, conseiller éducation de François Fillon de 2007 à 2012, évoque même un examen national d’entrée en Sixième avec la possibilité en cas d’échec de redoubler ou d’aller dans une « Sixième d’adaptation ».
Cet examen instauré sous la IIIè République a été supprimé en 1956, pour les élèves ayant la moyenne et plus, puis définitivement après 1972. Le RN refuse donc la massification et la démocratisation scolaire. Le baccalauréat redeviendrait un examen terminal dont les notes seules seraient retenues pour Parcoursup. Chudeau expose aussi la volonté de son parti de restreindre l’éducation prioritaire aux seuls REP + avec « une mission d’assimilation, d’élévation des élèves au rang de citoyen français, pas de citoyen du monde ». C’est l’Ecole de la fabrique du nationalisme fermé. Marine Le Pen voulait des manuels scolaires labellisés (page 11), Attal et Belloubet s’y sont attelés. Marine Le Pen appelait à un diplôme national du brevet comme examen d’orientation post-Troisième, Attal et Belloubet s’y sont attelés.
Marine Le Pen entendait refonder le recrutement des professeurs, les former hors de l’université et mettre en avant le mérite dans le déroulement des carrières, Attal, Belloubet et Guérini s’y sont attelés.
Peut-être est-ce pour cela que le programme pour l’Ecole de Bardella est aussi léger (mais lourd de sens) car il ne fait que reprendre et qu’accentuer la destruction de l’Ecole publique démocratique et émancipatrice menée par Macron et ses sbires depuis 2017 ?
Cyrille Orlowski pour le SNES-FSU de Gironde