Monsieur le Recteur,
Mesdames et Messieurs les membres du CSA académique
La période est anxiogène pour les personnels que nous représentons dans cette instance. La baisse démographique annoncée, conjuguée aux restrictions budgétaires qui prévoient la suppression de 4000 postes dans l’Education Nationale à la rentrée 2026 et, au-delà, le non remplacement d’une fonctionnaire partant à la retraite sur trois, voire sur deux, sont particulièrement inquiétantes. Les craintes individuelles – perdre son poste, ne pas parvenir à muter – se mêlent à celles qui concernent plus largement le système éducatif. Alors que l’école est à l’os, est-il possible que des responsables politiques envisagent de rogner encore des moyens au lieu de saisir l’opportunité d’améliorer le taux d’encadrement ? Les effectifs actuels dans nos classes pénalisent la réussite de nos élèves. L’école, la société, ont profondément changé ces dernières années et les enfants, les adolescentes dont nous avons la charge ont besoin d’un accompagnement renforcé pour avoir toutes et tous les mêmes chances. C’est un enjeu d’égalité, c’est la mission de l’école publique. L’accomplir c’est viser l’augmentation du niveau de qualification de toutes et tous, le développement de l’ensemble des élèves, leur émancipation et l’acquisition d’une culture commune, pour faire société. L’ensemble des disciplines scolaires participent à cette culture commune, notamment les enseignements artistiques ou sportifs qui doivent rester dans l’école publique. La FSU s’opposera à l’externalisation ou même au renvoi à des ateliers pratiques l’après-midi pour une partie d’entre elles. L’École a besoin avant tout de moyens et de temps pour pouvoir faire progresser les élèves.
Par ailleurs, nous nous inquiétons des discours des DASEN entendus dans les départements de l’académie, et tout particulièrement en Dordogne, où la DASEN a adressé un courrier, notamment aux maires, laissant sous-entendre un plan de fermetures d’écoles rurales et la remise en cause du modèle RPI.
La FSU porte le mandat de transformer la baisse démographique en gain qualitatif, et demande le maintien des postes dans les écoles rurales.
L’école publique nécessite également des changements radicaux pour que les métiers de l’éducation retrouvent de l’attractivité. Un statut de catégorie B pour les AESH, dont la précarité est indigne d’une mission de service public, est revendiqué cette semaine et plus particulièrement en ce jour par une large intersyndicale. Pour l’ensemble des personnels, une revalorisation des salaires, des carrières, est une urgence. Il faut en finir avec le « travailler plus pour gagner plus » qui prévaut depuis de nombreuses années et conduit les agentes du service public à l’épuisement. Il faut aussi en finir avec une politique qui les incite à prendre le risque de travailler même lorsqu’elles ou ils sont malades, du fait de journées de carence ou de baisse du maintien de la rémunération. La DEPP le souligne dans L’état de l’école de 2025, les perspectives de carrière en matière d’avancement, de promotion, de titularisation et de rémunération sont un domaine d’insatisfaction marqué (2,8/10) et le manque de temps pour effectuer le travail est pointé.
Nous profitons d’ailleurs de ce CSA académique pour porter la parole des directrices et directeurs d’écoles de nos départements, depuis plusieurs années submergées de travail. Comme nous l’avons signalé lors de la Formation Spécialisée académique, beaucoup sont particulièrement épuisées par la charge de travail qui leur est imposée depuis cette rentrée. Il est urgent que celle-ci soit allégée.
Le Tribunal administratif a donné raison aux collègues psychologues et enseignant.es spécialisé.es du RASED en condamnant le rectorat de Bordeaux à payer la totalité des frais de déplacements effectués par les collègues, majorés des intérêts de retard. La FSU exige que celui-ci se mette enfin en conformité avec la loi en remboursant intégralement tous les déplacements effectués par les collègues itinérants, sans que ceux-ci aient besoin de saisir la justice.
Elle s’étonne du courrier envoyé par le monsieur le DASEN de Gironde le 4 décembre dernier aux coordonnateurices REP de l’académie, leur indiquant une baisse de leur IMP avec effet rétroactif au 1er septembre. Cette modification n’est pas justifiée par de nouvelles conditions nationales. Nos collègues se sont engagées sur cette mission cette année scolaire avec des conditions indemnitaires précises. Nous demandons à ce que celles-ci ne changent pas en cours d’année scolaire et donc en cours de mission, et nous contestons la possibilité de rétroactivité de la baisse de cette IMP.
La réforme du « choc des savoirs » a vécu. Le travail mené par la FSU pour dénoncer le creusement des inégalités qu’elle engendrait a été corroboré par l’Inspection Générale et elle est en passe d’être abandonnée. Le caractère optionnel des groupes de besoins ne devra pas déboucher sur une éducation à deux vitesses dans les collèges et un renforcement de l’autonomie des établissements. Les moyens qui avaient été engagés sont à maintenir pour rétablir la technologie en classe de 6e et, au-delà, être répartis par les conseils d’administration. Alors que le décret visant à encadrer les points de jury pour l’obtention du baccalauréat vient d’être publié, dans l’objectif, selon le ministre, de « redonner de la crédibilité au bac », la FSU redit qu’il est urgent de remettre à plat le lycée et le baccalauréat des réformes Blanquer qui ont creusé les inégalités sociales et genrées.
Concernant la carte des formations professionnelles, les 5 places de moins en BTS à la rentrée 2026 interrogent au regard de la poursuite prévue de la montée des effectifs dans le supérieur qui s’est amorcée depuis deux ans et de celle, continue depuis 2022, dans les lycées professionnels. Cela signe un manque d’ambition pour les bachelières professionnelles que la réforme, avec son parcours en Y, guide bien trop précocement vers le marché du travail. La réforme précipitée des diplômes des métiers d’art réduit de nouveau le temps de formation des lycéens. Elle compromet l’avenir et l’insertion professionnelle des jeunes, orchestre une déprofessionnalisation des parcours des métiers de d’art tout en fragilisant des filières exigeantes, notamment les CAP, pourtant garant d’un savoir-faire reconnu mondialement.
Une nouvelle fois, la FSU le déplore, les ouvertures d’options facultatives, d’enseignements de langues vivantes étrangères, se feront sans moyens supplémentaires, sur les marges d’autonomie, dans une dynamique concurrentielle entre établissements et disciplines. Pour les faire vivre, il faudra en effet arbitrer, selon les cas, entre des réductions d’horaires pour des options, la disparition de certains dédoublements, des effectifs plus lourds dans les groupes de spécialité en lycée, la limitation du nombre de groupes ouverts en maths complémentaires ou encore le sacrifice d’un accompagnement personnalisé déjà moribond. Les options facultatives, les langues vivantes, participent largement de la construction de la culture de nos élèves, de leurs projets d’orientation, de leur émancipation et ces enseignements doivent être financés.
Enfin, la FSU ne peut pas rester silencieuse après les propos du Président Macron selon lesquels l’Education nationale devra « accompagner l’envie de servir », le lycée devenant la clé de voûte de la mobilisation de la jeunesse vers un service national volontaire, qui, pour recruter, met en avant « l’accélération de la menace ». Il s’agit notamment d’encourager les séquences d’observation des élèves de seconde dans l’armée, de rendre obligatoire la participation à au moins une cérémonie commémorative annuelle. La FSU rejette les discours bellicistes. Pour elle, l’éducation est la voie royale d’émancipation de la jeunesse et la condition fondamentale de la construction de la paix dans le monde, à l’inverse des classes de défense et de sécurité globale, nombreuses dans notre académie. Plus que jamais, dans cette période inquiétante, c’est une éducation à la paix qu’il nous faut promouvoir.
